Vous êtes directeur des risques et de la compliance et dans le cadre de vos fonctions vous avez également la sécurité et la sûreté dans votre périmètre, ce qui est très rare. Pouvez-vous nous présenter l’ensemble de vos missions ?
La fonction de Directeur Risks & Compliance a été créée en 2009 avec une extension progressive de son périmètre de responsabilités.
Mes missions recouvrent aujourd’hui les domaines suivants au niveau du Groupe Carrefour : gestion des risques (cartographie des risques majeurs, risques pays, cartographies opérationnelles, analyses ad-hoc, études prospectives…), assurances, intelligence économique (due diligence, management du risque fournisseur…), sécurité-sûreté (responsable fonctionnel en charge des cadres de référence et de l’animation au sein du Groupe, sécurité des voyageurs et expatriés, sécurité des événements type AG…), éthique (Code de Conduite Professionnelle, lutte contre la fraude, Forensic, secrétariat du Comité éthique Groupe et animation des comités éthiques Pays…) et gestion de crise (Dispositif, formations, simulations, informations du management en cas d’événement majeur).
Je participe également au Comité de Sécurité de l’Information que nous avons mis en place au niveau du Groupe pour traiter de toutes les questions de sécurité des SI.
Pensez-vous que l’on verra apparaître dans les prochaines années de plus en plus de directeurs des risques et de la compliance s’occupant également de sécurité et de sûreté ?
Ma fonction est assez spécifique notamment en ce qu’elle regroupe à la fois la gestion des risques au sens large et l’éthique alors que ces deux fonctions sont le plus souvent distinctes, mis à part peut être dans le cadre des due diligence dans le cadre de certains programmes de compliance.
Ce qui me semble probable est plutôt le développement des différentes composantes de la gestion des risques, tant au niveau de l’analyse des risques dans une logique d’anticipation et une vision prospective que des aspects plus opérationnels tels que la sécurité et la sûreté. Chacune de ces fonctions est amené à se développer, à se structurer et à se « professionnaliser » afin d’accompagner la mise en œuvre de la stratégie de l’entreprise, et progressivement de contribuer à la définition de celle-ci par une démarche accrue d’anticipation et de prise en compte des risques.
De mon point de vue, peu importe le rattachement, le plus important est que les différentes personnes en charge de ces sujets travaillent ensemble de manière décloisonnée, ce qui évitera beaucoup d’inefficacité et renforcera la crédibilité globale de chaque fonction.
Vous êtes à cette fonction plusieurs années, quelles sont les leçons que vous tirez de ces années ?
Les modèles établis ont la vie dure et il convient plus que jamais de développer anticipation, adaptabilité et prospective pour éviter d’être pris en défaut. On ne peut pas tout savoir mais par la nature de nos fonctions, les attentes de nos interlocuteurs sont de plus en plus importantes, de même que la mise en place d’actions de prévention (diagnostic, information, formation…) permet de limiter les impacts éventuels en cas d’événement redouté tout en améliorant la résilience de l’organisation et des individus.
J’ai également pu observer au fil des ans et en particulier ces 5 dernières années, une évolution notable de la sensibilité des interlocuteurs opérationnels et du management à toutes les questions de gestion des risques et en particulier de sécurité et de sûreté. Au delà des discussions d’experts où tout le monde pense se comprendre, il me semble important de renforcer la crédibilité de ces fonctions par une démarche de pédagogie auprès de ces décideurs, de compréhension des business modèles, de développement de concepts à valeur ajoutée…
Enfin, alors que mon périmètre de responsabilités a été élargi au fil des ans avec une vision assez large des risques et de l’éthique, je suis aujourd’hui convaincu du caractère essentiel du décloisonnement, ce qui est naturellement facilité lorsque vous avez l’ensemble des fonctions concernées sous votre responsabilité. Chacun tente naturellement d’étendre son périmètre mais cela ne doit pas être préjudiciable à l’entreprise et doit se faire en bonne intelligence dans le respect mutuel et la reconnaissance des compétences de chacun.
Au niveau de la fonction de Directeur Sûreté, bien que relativement nouvelle dans une approche globale, elle devient de plus en plus critique face à la multiplication des menaces, ce qui nécessite pour son titulaire une vision à 360° de l’entreprise et de ses marchés, une grande ouverture d’esprit et une capacité double à analyser / diagnostiquer tout en mettant en place des solutions opérationnelles permettant d’améliorer la maîtrise des risques.