Se développant sur les cendres du World Trade, la sécurité des entreprises a connu un essor formidable ces dernières années aux Etats-Unis.
Le milieu des affaires et le gouvernement américain ont pris la mesure de l’enjeu. La sécurité des entreprises est devenue alors en peu de temps un enjeu de sécurité nationale. A la fois poussée par le terrorisme international et la mondialisation, la fonction sécurité trouvait une place de choix au sein des multinationales américaines, et dans le cadre de la création du Homeland Department américain, sorte de super ministère de l’intérieur, le gouvernement dégageait de nouveaux moyens pour assurer la sécurité des entreprises nationales.
En Europe, la situation est évidemment et malheureusement très différente. La sécurité n’est pas un mot valorisé par le milieu des affaires et par les Etats. Tous les grands groupes européens ne disposent pas d’un département sécurité et les Etats considèrent le plus souvent cette question comme mineure. Dans ce contexte, chacun réfléchit dans son coin sans concertation et sans cohérence d’ensemble. C’est ainsi par exemple que le gouvernement Merkel a adopté le 20 août un projet de loi qui se veut empêcher toute prise de participation de plus de 25% d’une firme extra-européenne dans une entreprise allemande qui « nuirait à l’ordre et à la sécurité publics ». En réaction, le milieu des affaires a violemment réagi contre cette mesure, la jugeant protectionniste et floue.
La situation française n’est guère plus réjouissante. La mise en place des Directives Nationales de Sécurité (DNS), qui vise à prévenir des menaces contre les Opérateurs d’Infrastructures vitales (OIV), essentiellement des opérateurs privés, s’est fait sans une grande concertation, ce qui fait que certaines entreprises sont dans l’obligation de prendre des mesures de prévention représentant pour elles un coût exorbitant sans qu’elles aient eu réellement leur mot à dire.
Le développement des menaces qui pèsent sur les entreprises européennes nécessite que cette situation change. Face à l’espionnage industriel, au terrorisme, à l’essor de la cybercriminalité ou encore à la nouvelle dimension qu’à pris la fraude (pensons à l’affaire de la Société générale), il devient urgent de créer des synergies public-privé dans le domaine de la sécurité d’entreprise. Etats et entreprises doivent se mettre d’accord sur une stratégie de sécurité économique concertée, ce que les américains ont réussi à faire. Comment entreprises et Etats s’organisent-ils pour faire face au pillage organisé de secrets industriels ? Comment s’organisent-ils pour prévenir des menaces terroristes sans entraîner de coûts exorbitants ? Quelle stratégie commune peut-on élaborer en matière de cybercriminalité ? Voilà quelques questions qui méritent une réponse globale et partagée entre le public et le privé.
En d’autres termes, la sécurité doit devenir fluide. Nous entendons par fluide que cette thématique ne soit plus traitée de façon confidentielle et cloisonnée mais débouche sur des échanges permanents, des actions communes, voire des financements conjoints. Si la sécurité est un enjeu national, il convient que l’ensemble des forces vives de la Nation soit effectivement associé.