Olivier Williamson, prix Nobel d’économie 2009, a mis en évidence dans un article intitulé « Comparative Economic Organization : the Analysis of Discrete Structural Alternatives », l’importance de l’environnement institutionnel, à savoir le cadre légal, la sécurité des droits de propriété mais également les us et coutumes dans un pays, comme levier d’incitation au développement du marché. Il prenait déjà à l’époque l’exemple de la Russie qui, Perestroika oblige, entrait progressivement dans l’économie de marché. La violence et la corruption n’étaient alors pas propices au climat des affaires.
20 ans plus tard, le problème s’est-il résorbé ? Trouve-t-on beaucoup d’investisseurs en Russie et quelle est la politique des entreprises étrangères vis-à-vis de ce pays ? La presse s’en fait peu l’écho mais les groupes internationaux sont encore peu incités à se développer dans cette région du globe et l’on peut considérer cela comme un doux euphémisme. Malgré le fait que le 19 mai 2009, le président Dmitry Medvedev signa un décret visant à combattre la corruption et fit de la lutte contre la corruption l’une des priorités de son programme, la corruption en Russie paraît encore très élevée. Sur la base de l’indice de corruption réalisé par le transparency international report 2009, parmi les pays du G20, la Russie est considérée comme le plus corrompu et dans le classement des 180 pays recensés, elle figure parmi les 30 pays les plus corrompus de la planète.
Sur place actuellement les entreprises étrangères en paient un lourd tribut. Ainsi le groupe suédois Ikea qui possède douze magasins dans le pays, vient de licencier deux de ses cadres. Pour résoudre un problème d’approvisionnement en électricité dans un magasin à Saint-Pétersbourg, Per Kaufmann, directeur général pour la Russie et l’Europe de l’Est, ainsi qu’un autre dirigeant auraient permis le versement d’un pot-de-vin par l’intermédiaire d’un sous-traitant. Une pratique courante dans le pays. Mais, contraire à la ligne éthique du groupe. Face à ce phénomène, Ikea avait d’ailleurs annoncé « la fin temporaire de son expansion » (Les échos, mardi 16 février). Après avoir été empêché d’ouvrir un magasin à Samara pour des raisons bureaucratiques, il a du en fermer un autre à Nijni Novgorod car les autorités considéraient qu’il ne respectait pas 750 normes anti feu !
Perte de temps liée aux lourdeurs bureaucratiques, menaces, visites inopinées dans les bureaux, déstabilisation des cadres dirigeants sur place, les coûts potentiels d’investir en Russie paraissent par conséquent fort nombreux. A la fois en termes de réputation, de sécurité, d’éthique et pour des raisons économiques, les dirigeants des grands groupes doivent bien avoir conscience des difficultés auxquelles ils vont être confrontés avant d’investir. Pour le coup, les questions de sécurité et d’éthique doivent être un préalable à la logique de business.